Alain Delon n’était pas mon acteur préféré. Et je n’étais pas toujours d’accord avec ses propos. Mais il fait assez partie de ma mythologie personnelle, ma « partition de vie » selon Kundera, pour que j’ai eu envie de poser quelques mots sur lui.

J’ai d’abord aimé Delon pour Romy, pour mon père aussi, qui m’a fait découvrir sa filmographie et qui entre les autres Guépard et Samouraï a une tendresse pour « Le Professeur », un rôle à contre-emploi. Je l’ai aimé ensuite pour l’acteur, qui dosait au millimètre sa force et sa sensibilité et qui avait des regards dont on ne pouvait se détacher. Je l’ai aimé pour ses yeux. Et le reste.

Quand Delon entrait dans une pièce, celle-ci se vidait de son air. Et il le savait. Il n’avait aucune candeur quand il s’agissait de sa beauté ou de son talent, il en était beaucoup trop conscient. C’était peut-être l’une de ses plus grandes faiblesses.

J’ai eu la chance de l’interviewer pour mon premier numéro de la revue L’Agenda. Pour un premier coup dans une carrière de journaliste, on peut faire pire. J’aurais pu faire mieux aussi, être encore plus prête et, on peut le dire, Delon n’était pas facile, il testait sans cesse ses interlocuteurs, et j’étais si impressionnable ! Heureusement, ses réponses étaient plus intéressantes que mes questions et je garde un très bon souvenir de cet article. Une certaine fierté, aussi.

Nous étions en 2013, il m’avait dit qu’il ne pensait pas à la mort. Qu’elle ne lui faisait pas peur. Je crois qu’il a vécu sa vie comme il l’a voulu. Cela me rend triste de penser qu’on ne peut pas dire la même chose de sa mort, qui lui a été arrachée par la maladie et volée par les médias et les prémisses de batailles juridiques.

Il reste de beaux films, des chefs-d’oeuvre qui font l’histoire du cinéma dont une partie nous échappe un peu avec le départ d’Alain Delon. 

Qu’il repose en paix auprès de ses amis et de ses amours.